Un phare dans l'océan

Le retour en France


Marc arriva en France en novembre 2009. Il était heureux de retourner au pays après quatre ans d’absence car il éprouvait une immense joie à l’idée de serrer ses proches dans ses bras. Il les avait tous revus lorsqu’il passait les fêtes de Noël sur Paris mais cette fois son retour était définitif. Plus de grand voyage, plus de vie d’immigré, son destin était en France.
Comme à son habitude, Marc n’avait prévenu personne de son retour mais il avait hâte de revoir son frère qu’il rejoignit directement sur son lieu de travail dans un quartier huppé de Paris. Son arrivée dans l’ascenseur ne passa pas inaperçu : il n’avait pas dormi depuis trente heures, sa peau était burinée et sa tenue vestimentaire rappelée l’été alors que le froid de novembre glaçait le sang des parisiens. Une fois à l’accueil, il posa ses deux énormes sacs chargés de cadeaux et demanda à voir son frère. Les retrouvailles dans cette famille n’étaient jamais expressives mais elles réchauffaient les cœurs par le bonheur sincère de se serrer dans les bras. Après les embrassades, ils partagèrent un café chaud pour échanger les dernières nouvelles dont la première fit extrêmement plaisir à Marc. Son frère allait être père pour la deuxième fois. Marc constata qu’il avait, lui aussi, envie de fonder une famille ce qui pouvait s’expliquer par la trentaine approchante.

Après son frère, Marc vit ses vieux amis d’école et du travail. Par chance, une soirée était organisée le soir même. Dimitri, Alex, Marie, Pierre-Alain, Renaud, Piero, Maude… ils étaient tous là. Fête joyeuse, festive où il faisait bon se retrouver. Les heures s’égrenaient dans l’alcool, la danse, le chant et les rires. Lorsque les lueurs de l’aube apparurent, Marc n’avait plus de voix à force de chanter les airs de sa jeunesse. Quel bonheur d’être en France ! Quel bonheur de retrouver ses racines !

Marc se réveilla tard le lendemain. Pourtant il n’avait pas de temps à perdre car son argent était épuisé et il voulait retravailler rapidement pour ne pas dépendre de sa famille prête à l’aider. Il acheta un billet de train pour Grenoble où ses parents l’attendaient. Il voulait les serrer dans ses bras et retrouver le peu d’affaires qu’il avait entreposé avant de faire son tour du monde. Il se voyait déjà exercé son métier de consultant en informatique qui exigeait de revêtir le costume, porter la cravate et de parler avec assurance. Belle ironie pour cet homme qui venait de traverser quatre continents en T-shirt, short et tongues.

Les parents de Marc approchaient la soixantaine en conservant une belle forme physique. Leur alimentation saine et la promenade hebdomadaire dans les montagnes leurs avaient permis de conserver toute leur énergie. Comme dans beaucoup de foyers, l’adolescence avait parfois était difficile entre les enfants et leurs parents mais ce temps était révolu. Marc avait compris les intentions de ses parents qui souhaitaient le meilleur pour leurs enfants. Ils avaient du faire des choix courageux en sacrifiant les intérêts immédiats au profit des intérêts futurs avec parfois des grincements de dents. Bien sûr certains de leurs actes avaient manqué de justesse mais le jeune homme trouvait qu’ils avaient fait un bon travail éducatif. Ils lui avaient appris le goût de l’effort et la valeur des choses. Marc avait été dressé pour être poli, travailleur, discipliné. Autant de valeurs qui lui permirent de réussir la première partie de sa vie où il avait obtenu un diplôme d’ingénieur, écrit un livre, fait le tour du monde, travaillé aux Etats Unis, monté son entreprise, vécu deux belles histoires d’amours et beaucoup d’autres choses… Tout ça il le devait en partie à ses parents qui lui avaient donné les cartes pour réussir.

Comme avec son frère, les retrouvailles furent chaleureuses mais pas démonstratives. Les non-dits parlaient à ceux qui savaient les entendre et ceux-ci manifestaient une certaine fierté pour le parcours atypique de Marc mais aussi une certaine inquiétude pour sa situation précaire. Ses parents pensaient sans jamais le dire « Un an sans travailler, qui voudra encore te faire confiance ». Ils avaient toujours été salariés de la même entreprise et n’avaient jamais voyagé. Ils aimaient la stabilité, la sérénité là où Marc appréciait le changement synonyme de découverte et d’amélioration. Par leur vie différente, les parents du jeune homme avaient des difficultés à comprendre leur fils mais son diplôme, son entreprise, son voyage étaient autant de preuves de ses qualités. Ils espéraient son rebond mais tant que celui-ci n’aurait pas eu lieu, ils seraient inquiets.

Marc décida de rester une semaine à Grenoble pour profiter de ses parents mais aussi reprendre contact avec les anciens clients de l’entreprise qu’il avait créée avant son départ aux Etats Unis. Il envoya des mails, des CV, téléphona mais après quatre ans sans nouvelle, c’était un peu comme s’il était mort. Après quelques jours, Marc comprit que le démarrage serait plus dur que prévu avec l’obligation de démarcher de nouveaux clients …

Pourtant la vie est pleine de surprises ! Michel, encore et toujours lui, allait tirer Marc de ce mauvais pas. Grâce à son charisme et aux dizaines de missionnaires qu’ils avaient formé, il avait réussi à convertir des milliers de français à sa religion. Parmi eux, il y avait un écrivain célèbre qui avait réécrit intégralement le livre de Marc dans un français poétique captivant les lecteurs.

Le site web du jeune homme où il publiait son livre avait été un échec avec peu de connexions. Depuis son retour en France, Marc l’avait abandonné et il ne s’était pas rendu compte que les articles dignes d’intérêt avaient été réécrits, ceux qui manquaient à la clarté du discours avaient été rajoutés et ceux qui ne servaient à rien avaient été supprimés. Une fois ce travail de réécriture terminé, l’écrivain célèbre avait contacté les médias. Grâce à son nom, le site web de Marc fit la une des journaux télévisés. D’un coup, l’affluence sur son site web fut incroyable avec plusieurs milliers de connexions et Marc fut contacté par une myriade de journalistes voulant l’interviewer. Il était devenu, du jour au lendemain, une vedette à la durée de vie incertaine. Il fallait agir vite car le public aime la nouveauté, l’extraordinaire mais se lasse également très vite.

Novembre 2009 se terminait et Marc allait être interviewé sur un plateau de télévision. Encore une fois, la prédiction de Michel lui demandant d’écrire un livre pour se faire connaître, s’était avérée exacte. Marc y pensait en se demandant si sa prochaine prophétie qui faisait de lui le président de la France se réaliserait. Michel lui avait donné le moyen d’atteindre ce but, il devait désormais le faire pour être digne des espérances qu’il avait soulevées.


Article rédigé par: Julien Bourlon le 07/03/09
Cet article est la modification du texte de: Julien Bourlon le21/02/09
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